Syrie : les États-Unis prêts à frapper de nouveau, "si nécessaire
"
Après le bombardement inattendu de jeudi, l'administration Trump s'est dite prête vendredi à "en faire plus", devant le Conseil de sécurité de l'ONU.
SOURCE AFP
Publié le
Les États-Unis ont averti vendredi qu'ils étaient prêts à lancer de nouvelles frappes contre le régime syrien et à mettre en place de nouvelles sanctions économiques, au lendemain du bombardement d'une base de l'armée syrienne. « Nous sommes prêts à en faire plus, mais nous espérons que cela ne sera pas nécessaire », a prévenu l'ambassadrice américaine aux Nations unies, Nikki Haley, devant le Conseil de sécurité. La diplomate s'exprimait lors d'une réunion d'urgence du Conseil consacrée à la première action militaire de Washington contre le régime de Bachar el-Assad en six ans de guerre. La frappe a eu lieu trois jours après l'attaque chimique présumée contre une ville rebelle du nord-ouest du pays qui a choqué le monde et pour laquelle le pouvoir syrien a été pointé du doigt. Le Pentagone soupçonne les Syriens d'avoir été aidés pour mener à bien cette opération, mais les militaires américains ne sont pas allés jusqu'à accuser la Russie.
La salve de missiles de croisière américains a provoqué la colère de la Russie, alliée indéfectible de Bachar el-Assad, avec l'Iran. « Les États-Unis ont attaqué le territoire souverain de la Syrie. Nous qualifions cette attaque de violation flagrante de la loi internationale et d'acte d'agression », a déclaré le représentant de Moscou à l'ONU, Vladimir Safronkov, lors de cette réunion. La réaction russe « est très décevante », a regretté le secrétaire d'État américain Rex Tillerson. Mais, malgré l'ire de la Russie, sa visite à Moscou la semaine prochaine n'a pas été annulée pour le moment. Selon une source militaire syrienne, l'armée de Bachar el-Assad avait eu vent de l'action américaine et avait « pris des précautions ». La Russie a aussi souligné que la frappe n'avait guère été efficace, moins de la moitié seulement des missiles ayant explosé sur la base visée, selon elle. L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) a semblé accréditer cette thèse et a noté que deux avions de chasse syriens avaient même pu redécoller de la base dès vendredi pour mener de nouvelles frappes, près de Palmyre.
« Des sanctions supplémentaires »
Face à ces critiques sur l'inefficacité de ce bombardement, Rex Tillerson a précisé que les Américains avaient délibérément épargné la piste de décollage elle-même, sans expliquer pourquoi. Le secrétaire au Trésor Steven Mnuchin a ajouté que Washington allait prochainement « annoncer des sanctions supplémentaires contre la Syrie ». La présidence syrienne a quant à elle qualifié ces frappes d'« acte idiot et irresponsable ». Le chef de l'ONU, la France et le Royaume-Uni ont plaidé pour leur part en faveur d'une solution « politique » en Syrie. Peu avant la réunion du Conseil, le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres avait ainsi appelé à la « retenue » et a souligné qu'il n'y avait d'autre solution que « politique » à la guerre qui déchire la Syrie.
Les frappes ont été ordonnées jeudi soir par Donald Trump, qui s'était pourtant toujours prononcé contre une intervention directe contre le régime syrien. Il n'a pas non plus cherché à obtenir d'autorisation du Conseil de sécurité avant cette action. Vers 3 h 40 locales vendredi, 59 missiles de croisière Tomahawk ont été tirés par deux navires américains en Méditerranée, vers la base aérienne d'al-Chaayrate (centre). Quelques heures plus tard, l'armée syrienne a fait état de « six morts, de blessés et d'importants dégâts matériels ». L'agence de presse officielle Sana a, elle, annoncé ensuite la mort de neuf civils, dont des enfants, dans des villages environnants. L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) a pour sa part indiqué que huit militaires avaient été tués, dont un médecin. Dans une déclaration solennelle à la télévision, Donald Trump a expliqué que ces frappes étaient « directement liées » au raid aérien imputé mardi à l'armée syrienne contre la localité rebelle de Khan Cheikhoun. Ce bombardement a fait au moins 86 morts, dont 27 enfants.
Girouette
Selon les services de renseignements américains, les avions ayant mené cette attaque étaient partis de la base d'al-Chaayrate, connue comme un lieu de stockage d'armes chimiques avant 2013. « Les États-Unis n'attendront plus qu'Assad utilise des armes chimiques sans conséquence. Ces jours sont révolus » , a repris Nikki Haley. En difficulté depuis des mois face au régime, la coalition de l'opposition politique syrienne a applaudi l'opération américaine, même si « frapper un seul aéroport n'est pas suffisant », a dit Mohammad Allouche, membre du Haut Comité des négociations (HCN). Les forces du régime cherchent à reprendre les derniers bastions des rebelles, notamment dans la province d'Idleb (nord-ouest), et des groupes djihadistes.
La décision de Donald Trump a été bien accueillie par les autres pays impliqués dans la crise syrienne, comme la Turquie et les États européens. À l'été 2013, Barack Obama avait déçu les pays arabes soutenant l'opposition syrienne en renonçant à frapper le régime après une attaque aux armes chimiques près de Damas qui avait fait plus de 1 400 morts selon le renseignement américain. À l'époque, Donald Trump avait exhorté Barack Obama à ne pas intervenir.
Ce service est réservé aux abonnés.
TOUTE LA RICHESSE ÉDITORIALE DU POINT OÙ QUE VOUS SOYEZ !
- - Le magazine en avant-première
- - Un accès illimité aux contenus du site et de l'application LePoint.fr
- - Un tarif très avantageux, sans engagement de durée